Le secret du Cœur qui pense
Inspiré par les écrits De Rudolf Steiner
Le secret du Cœur qui pense
L’époque de Michel est venue. Les cœurs commencent à avoir des pensées ; l’enthousiasme n’afflue plus seulement d’obscurités mystiques, mais bien plutôt de la clarté de l’âme soutenue par la pensée.
Rudolf Steiner
(Extrait des « Lettres aux Membres », 17 août 1924)
1. L’homme et le monde suprasensible.
Parler aujourd’hui d’une réalité suprasensible est une entreprise ardue. Un préjugé plus ou moins net est très souvent en vigueur à ce sujet : le refus de prendre seulement en considération l’argument, ou d’un autre côté, une hypothèse facile, qui voudrait en circonscrire l’existence dans le domaine du paranormal, du magique, du suggestif.
Une vision lucide et sereine, en accord avec une saine explication des forces humaines est au contraire plus rare à rencontrer, si nous faisons abstraction d’une tradition religieuse par ailleurs négligée par ses propres prêtres et officiants.
Et pourtant il n’en est pas ainsi. Le plus simple concept que nous nous formons des choses, et même de celles matérielles, présuppose un contenu suprasensible, auquel nous ne prêtons cependant guère attention, celle-ci étant déployée sur les réalités matériellement conçues plutôt que sur la manière dont nous les concevons. Concevoir une chose signifie la considérer dans la permanence de son être, indépendamment des impressions singulières, temporaires, que nous en recevons au moyen des sens.
Une telle permanence implique la non-soumission de notre intelligence aux conditions du monde sensible et sa capacité à puiser dans un domaine qui le transcende, donc au suprasensible.
Dans la conception la plus élémentaire des choses, exprimée par l’immanquable prononcé intérieur «telle chose est», l’intelligence se réalise indépendante de la sensibilité, et justement par la grâce de cette liberté, elle peut percevoir les réalités sensibles dans leur aspect non transitoire, à savoir elle peut les «comprendre».
En toute objectivité, je peux comprendre la réticence du monde dit « athée » envers ces écrits qui leur semble sans fondement.
Ce type de réalités, inhabituel pour nos habitudes mentales actuelles, était au contraire évident pour une orientation de pensée précédente qui partait de la simple et universelle conception de l’être, en tant que présupposé à toutes les autres.
La raison pour laquelle nous croyons devoir remiser cette orientation de pensée parmi les choses dépassées, réside dans la manière dont, en tant qu’hommes modernes, nous expérimentons la réalité.
L’attitude de notre esprit, qui résulte non seulement de notre éducation, mais d’une impulsion formatrice plus profonde, nous amène à faire en sorte que toute réalité perçue par les sens soit admise par nous, au moyen d’un procédé si habituel qu’il passe inaperçu, au sein des catégories spatio-temporelles, essentiellement mathématiques.
Nous n’accueillons pas le sensible dans le simple flux de ses apparences, mais nous le décomposons et le focalisons dans une dimension perspective non-naturelle — l’enfant, jusqu’à un certain âge ne saisit pas le monde en perspective — due à une élaboration intérieure déjà complexe.
Cette élaboration est entièrement l’œuvre de notre esprit, elle n’est pas donnée par nature : c’est elle qui fait en sorte que nous nous expérimentons dans le monde sensible comme des esprits actifs, en nous résolvant toutefois à croire que toute réalité s’épuise avec lui.
L’activité de notre esprit dans le sensible, qui peut aussi nous rendre intrépides et nous conférer une sensation presque démesurée de domination et de puissance, si elle n’est pas intégrée par une aptitude d’auto observation sincère et posée qui la retourne sur elle-même et sur ses propres principes, risque de mener à un esclavage fatal, destiné à barrer toute issue de notre existence au-delà de la dimension apparente et transitoire.
Nous avons pourtant à l’intérieur de notre Esprit beaucoup de réponses à nos questionnements sur l’existence des Mondes Spirituelles. Beaucoup de peuples qui ne sont pas dans cette course à l’industrialisation à outrances n’auraient même pas la conscience de réfuter le Monde des Esprits.
Une reconversion de l’intelligence des peuples dit « développés » vers la perception des énergies subtiles est en cours actuellement et permettra dans les temps futurs une meilleurs approche de ces Mondes.
La précédente orientation de pensée, à laquelle nous avons fait allusion, avait l’habitude de définir l’intelligence humaine comme une faculté « non organique ». Elle entendait dire avec ceci qu’à la différence des autres facultés telles que les sens, l’imagination, la mémoire, elle n’est pas liée à un organe corporel. Avec l’intelligence et la volonté qui émanent d’elle, l’homme transcende sa propre condition sensible. Il est en mesure de se concevoir lui-même et toute autre réalité quelconque comme un aspect, une manifestation spéciale, de cet être dont la lumière resplendit universellement en lui. Grâce au caractère « non-organique » de son intelligence, l’homme est doté de liberté et il peut se sentir membre d’un monde suprasensible. Telle est le simple dicté linéaire de cette conception plus ancienne.
Notre difficulté actuelle de concevoir certaines réalités de l’Univers suprasensible dérive de la manière de déployer notre intelligence tournée vers la réalité sensible. Sur le plan subjectif, nous avons tendance à nous ancrés à des faits liés à divers organes de perception, le système nerveux, la vue, l’ouïe et l’odorat. Ces perceptions font partie de l’animalité, la création nous a dotées de capacité beaucoup plus importante :
- L’intuition.
- L’intelligence.
- La créativité.
- La conscience.
- Et un Esprit constitué d’une Âme
Ce que l’homme peut faire aux objectifs d’une telle conscience, est alors celui de libérer l’activité pensante dont il fait habituellement usage dans le lien sensible temporaire, en l’exerçant à se retourner sur les processus de formation du concept sur lequel elle se fonde. En se liant au sensible, elle s’est éveillée comme œuvre d’un esprit actif. Ce même esprit a maintenant la tâche de la reconduire à la plénitude de ses fonctions. Maints exercices indiqués par les écoles qui cultivent l’intériorité de l’homme visent précisément, comme ascèse préliminaire, à une libération de l’intelligence comme elle est comprise ici.
Tout comme pour remonter au suprasensible, on part de l’activité pensante, en scindant en elle ce qui est sensible de ce qui ne l’est pas, on pourrait, par une opération analogue, intervenir sur les autres activités de l’âme, sur le sentir et sur le vouloir. Si, à partir de notre vie, de notre sentir, nous parvenons à discerner la présence d’Energies Divines, nous aurions accompli un pas important vers l’acquisition d’une conscience suprasensible. On peut dire la même chose de l’activité de la pensée et motrice, dont la contrepartie intérieure est plus spirituelle, en s’estompant presque entièrement dans la sensation sombre et profonde de notre corps physique.
Pour cela il nous faut opérer d’abord dans le mental, les autres activités de l’âme peuvent être temporairement éloignées de l’horizon de la conscience, en nous permettant de nous dévouer imperturbablement au contenu suprasensible du mental lui-même. Dans ce cas, en effet, les représentations sensibles du mental non libéré s’entremettent continuellement dans la conscience, en perturbant l’opération intérieure que l’on entend accomplir. Raison pourquoi il est conseillé que la conversion du mental précède, ou au moins se déroule parallèlement, à celle du sentir et du vouloir. Cela est requis par la constitution de l’homme moderne, dont personne parmi nous ne peut faire abstraction.
Quand à partir du contenu suprasensible du mental, des sensations et de la volonté, commence à ruisseler une vie qui n’est pas celle du « Je » propre, surgit une situation qui peut être perçue comme une grâce. Celle-ci fait en sorte que là où l’homme parvient à la limite de sa transcendance, se présente un monde, d’abord de forces et ensuite d’entités spirituelles, dans l’accord merveilleux duquel il sent reposer et se mouvoir son être propre. L’ascèse intérieure se réalise alors dans une révélation. Les forces de l’âme, reconverties à leur principe, ouvrent l’accès à un domaine de spiritualité vivante, dans lequel est supprimé l’événement entier qui se déroule sur le plan sensible.
Le chemin d’ascèse et de révélation que l’être humain peut parcourir au travers du développement de l’âme, ne le concerne pas seulement, mais aussi cette partie du monde sensible dont il est responsable et qu’on appelle communément « nature ». Dans des époques passées et chez certain peuples, c’est l’expérience suprasensible qui donne à l’homme l’orientation pour connaître la nature comme elle est en soi et pour y agir en conséquence. Puis, à partir d’un certain moment, cette expérience s’est progressivement obscurcie. Pendant quelque temps, l’humanité a pu, dans le but de s’affermir dans l’exercice autonome de ses propres facultés, avancer en étant privée de l’orientation qui lui venait de par le rapport qu’elle entretenait avec le suprasensible. L’objectif atteint, une telle situation n’est plus prévue. L’autonomie obtenue requiert de se compléter de nouveau dans cette plénitude d’être, à cause de la perte de laquelle elle est venue. Si cela n’advenait pas, l’homme verrait sa propre autonomie se retourner contre lui. La réalité spirituelle destinée à le compléter se présenterait également à sa conscience, mais sous un aspect ténébreux et inférieur. Il serait induit, dans son comportement à l’égard de la nature, à violer les intentions créatrices qui la gouvernent, et à ériger un monde étranger à celui qui lui a été confié, dans le rapport duquel, lui-même, sans non plus s’en apercevoir, glisserait dans le sous-humain. D’innombrables phénomènes de notre temps indiquent qu’un tel processus est déjà en cours.
2. Saint Michel dans la tradition chrétienne.
Purification, illumination et perfection sont traditionnellement les trois degrés de l’initiation, à savoir de la voie par laquelle un sujet doué de spiritualité s’élève à une plus vaste participation de l’être. Cela signifie que les esprits supérieurs remplissent, vis-à-vis de ceux inférieurs, la fonction d’initiateurs. Non pas qu’ils exercent une « domination », sur ceux-ci, mais les servent, au contraire, en les faisant prendre part, par acte de don. C’est une transmission de lumière et d’énergie spirituelles qui lie par un lien d’amour tous les esprits hiérarchiques, à savoir non déchus, présents dans l’univers.
En descendant l’échelle des êtres et en arrivant à l’homme, on pourrait penser que, en recueillant en lui les intentions créatrices de toute la nature visible, le monde suprasensible en entier opère comme son initiateur, en répartissant sa propre action dans les diverses puissances et facultés, au moyen desquelles son âme est tournée vers le spirituel. Dans ce cas, l’élévation de l’homme ferait participer le monde visible aux énergies qui parcourent l’invisible et serait ainsi admirablement clos le cercle qui unit la nature suprasensible et celle sensible.
Afin que cela advînt, il fut nécessaire que dans l’homme se déploie intégralement les intentions créatrices placées en lui. Cependant, une telle condition ne se produit pas, car l’homme est partiellement déchu par rapport au projet originel de sa création. Ceci est la raison pour laquelle les Hiérarchies célestes, devrait développer des actions sur la Terre par le Médiateur suprême.
Pour comprendre le rôle remarquable que Saint Michel assumera dans la tradition chrétienne, il faut tenir compte de ce que lui-même révélera de lui-même aux hommes au cours du temps, en se manifestant par des voies convenables à sa propre nature et à la leur, et en amenant ainsi une nouvelle lumière quant à ce qui est dit de lui, souvent sous une forme voilée dans les Écritures. On ne doit pas croire, bien sûr, que dans tout ce qui a été transmis, à partir des premiers siècles, sur lui dans les récits et légendes, l’imagination humaine, avec tout ce qui peut agir d’arbitraire en elle, n’ait pas joué son rôle. Il y eut aussi celui qui mit radicalement en doute l’authenticité de ses révélations successives, en craignant qu’avec elles s’introduisissent aussi des éléments impurs dans la tradition chrétienne. Toutefois, avec le temps, elles s’imposèrent presque de leur propre force à la conscience de l’Église, en devenant une partie intégrante de sa tradition.
Si, à partir du riche patrimoine légendaire, artistique, liturgique et doctrinal, qui nous est parvenu du Moyen-Âge, nous essayons de discerner une composante essentielle, en ramenant à elle ce qui n’est ni fictif, ni arbitraire, s’y présentent à nous deux phases assez distinctes de la révélation de Michel à l’humanité durant cette période.
La première est caractérisée de véritables apparitions de l’Archange, lequel donne avec elles des ordres aux hommes sur où et comment doivent être édifiés les sanctuaires, au travers desquels il entend développer sa propre action. La plus ancienne apparition du genre, sur laquelle on dispose d’informations, est celle qui est advenue à Chonae — l’actuelle Konia, en Turquie — à l’Est d’Éphèse, non loin de Laodicée. Deux motifs s’y rencontrent qui seront plus rares par la suite : l’action de Michel sur les éléments et les guérisons miraculeuses. Toujours en Orient, l’empereur
Constantin aurait reçu en songe l’indication de consacrer à Saint Michel un édifice sacré qu’il entendait ériger à Constantinople, en ouvrant ainsi la voie à une série de sanctuaires dédiés à lui dans cette ville, parmi lesquels le plus important eut pour nom le Michelion. Là, l’Archange apparaissait « de nuit » à ceux qui s’étaient préparés de façon adéquate au moyen d’une sévère ascèse, qui culminait dans le rite de l’incubatio, une sorte de « sommeil dans le temple », tel qu’il était déjà en usage dans les Mystères antiques.
À partir du cinquième et sixième siècle, le courant de révélation de Michel se déplace vers l’Ouest. Le sanctuaire du Mont Gargano, élevé suite à trois apparitions advenues, selon la tradition, le 8 mai 492, le 19 septembre de la même année et le 29 septembre 493, deviendra le plus important centre de diffusion du culte de Saint Michel en Europe. À celui du Mont Gargano, se reliront deux autres sanctuaires importants, dus eux-aussi à une apparition, localisés par rapport au premier sur une même ligne droite idéelle; Mont Saint Michel en Normandie (début du huitième siècle) et le sanctuaire Sacra de Saint Michel dans le Val de Susa (dixième siècle), celui-ci situé exactement au milieu de la ligne idéelle. Ils constitueront, selon l’expression d’une chronique de l’époque, « trois lieux particuliers », en tant que buts de pèlerinage. Alors que dans la légende des origines des deux premiers, nous trouvons encore le motif de la source miraculeuse, pour le troisième, l’influence des guérisons passe au second plan par rapport à la fonction cultuelle véritable. Tous les trois ont cependant en commun l’initiative de l’Archange par rapport à la construction du sanctuaire, et dans la première et la troisième sa substitution à l’évêque pour la consécration du lieu. « Ce n’est pas à vous — dit-il à l’évêque dans la légende du Gargano — de consacrer, l’église que j’ai construite. Moi-même, en effet, qui l’a construite, je l’ai aussi consacrée.
Vous, vous devez simplement entrer et visiter ce lieu placé sous ma protection par votre prière. Et quand toi, le matin tu y célébreras la messe, le peuple devra communier selon la coutume.
Ce sera à moi de montrer de quelle manière j’ai moi-même rendu saint ce lieu ». Au sanctuaire du Val de Susa, ce sera l’évêque lui-même qui renoncera à la consécration, en l’estimant superflue, tandis qu’au Mont Saint Michel, il recevra à ce sujet des dispositions de l’esprit compétent.
Similaire à ce dernier motif et commun à tous les trois sanctuaires, c’est une présence spéciale, «pendant la nuit» du monde suprasensible dans le lieu saint. Au sujet du Gargano, on dit que de nuit les anges y célèbrent le culte, guidés par leur prince sublime, et que donc aucun être humain ne peut y rester, sauf cas exceptionnels et avec la préparation voulue. On retrouvera à la Sacra un écho de cette réalité dans l’usage de la laus perennis, à savoir de l’adoration perpétuelle, jour et nuit, à tour de rôle, du Très Saint de la part des moines. Toutes les caractéristiques rappelées ici indiquent un rapport spécial de Saint Michel avec « l’Église invisible » et avec ce qui d’elle se manifeste aux hommes.
Les traits iconographiques dérivés des premières apparitions qui se sont surtout répandues dans l’aire byzantine, précisent la façon dont les hommes eux-mêmes ressentent le déroulement de cette fonction qui est la sienne. Ce sont les enseignes de Celui qui régit le monde, mais ce n’est pas lui dans ce cas le régisseur : il agit par simple mandat du Régisseur suprême. La verticalité du sceptre et du personnage même, la circularité en soi close de la sphère, soulignent la transmission impersonnelle d’un bien durable et transcendant. De l’Archange émane une paix surhumaine et céleste et grâce à la vertu illimitée de cette paix, il agit dans le monde terrestre. Dans la première phase de la révélation de Michel à l’humanité chrétienne ne semble pas encore prévaloir la perspective de la « Hiérarchie céleste ».
La seconde phase de la révélation, qui se superpose en partie à la première dans le temps, mais désormais n’est plus reliée à l’Orient, mais à la nouvelle entrée dans l’histoire des populations germaniques européennes, nous introduit dans un climat différent. Ici nous avons moins à faire à des apparitions et des allocutions qu’à la perception plutôt d’une présence, accompagnée parfois de
visions brèves. Les hommes traduisent avec des moyens expressifs à leur disposition, des rapports d’entités et de forces qu’ils perçoivent sur le plan spirituel. Parmi les premiers à vivre de cette façon le rapport avec l’Archange ce sont les Lombards, lesquels lui consacrèrent la principale église de leur royaume à Pavie et lui érigèrent d’innombrables édifices sacrés dans toute l’Italie.
Héritier de la familiarité qui leur est propre des Lombards avec Saint Michel, c’est le peuple qui leur ôte leur suprématie sur la péninsule italienne, en arrivant peu après à instaurer dans l’aire européenne une autorité valable pour la domination temporelle, mais ayant reçu des prérogatives spirituelles, reconnue comme une instance supra-ordonnée par les divers peuples : nous nous référons au peuple des Francs et à la fondation du Saint Empire Romain. Dans tout ce qui est advenu à la cour de Charlemagne entre le huitième et le neuvième siècle ce qui est à voir, ce n’est pas seulement un ensemble de faits concernant la vicissitude de l’empire naissant, mais aussi la préparation de l’évolution culturelle européenne des siècles successifs. Dans la Schola palationa d’Aix-la-Chapelle, placée au coeur germanique de la nouvelle Europe, confluent l’héritage spirituel gréco-latin désormais christianisé et les nouvelles impulsions provenant d’Irlande, «l’île des Saints», et sont ainsi posées les bases de la grandiose civilisation qu’aujourd’hui nous appelons «romane».
Par une série d’hymnes et d’inscriptions sacrés remontant à ces siècles silencieux de préparation, nous pouvons relever la manière dont l’image de Saint Michel s’est progressivement métamorphosée par rapport à celle qui s’est déjà affirmée en Orient.
Dans un hymne de Moilruains, un abbé de Tallaght, l’une des figures guides de l’Église irlandaise au huitième siècle, Saint Michel apparaît comme celui qui a reçu « de la main de Dieu la splendeur de lumière d’éternité » et qui « regarde en face son Créateur de la pure façon des anges ». Il est non seulement « condottière » et « pasteur » des hommes, mais « roi » et « Seigneur » de ces mêmes légions angéliques, pour lesquelles il resplendit comme un « Soleil ». « Lumière des cieux et de la Terre », « guide de la sagesse, maître de vérité », il « brille dans la légion des Vertus » et sert de « bouclier aux peuples humains », en tenant en respect, grâce à sa valeur profonde, les puissances hostiles des ténèbres.
À Alcuin de York, appelé par Charlemagne pour diriger la Schola palatina, est attribué un hymne en honneur de Saint Michel et dédié au même empereur, dans lequel l’Archange figure comme « prince des armées célestes », « abatteur du cruel dragon », à la vengeance duquel il a arraché « la plus grande partie des âmes ». Pour la première fois, lui est en outre attribuée la fonction de prêtre céleste : il est celui qui « tient en main l’encensoir d’or dans le temple du Seigneur », faisant s’élever des nuées d’encens qui parviennent jusque « devant l’éternel ». Dans une inscription d’autel attribuée au même Alcuin, Michel est « le principe éthéré (aethereus princeps) » et le « premier maître », et aussi celui qui « apporte les prières dévotes, les sacrifices offerts lors du culte, aux hauteurs secrètes des cieux, au regard du Dieu Très haut ».
De cette importance exceptionnelle de Michel dans le Cosmos, offre une reconnaissance très audacieuse un autre hymne, de deux siècles postérieurs à celui d’Alcuin, surgi dans le domaine culturel gothique présent alors en Espagne. Lui, « compagnon des Trônes » et « habitant du royaume des Dominations » émerge de la « légion des Vertus », en rayonnant de lumière dans la «couronne des Principautés et des Puissances». Le même chœur des Chérubins l’honore comme «porteur du feu expiatoire», tandis qu’il « Brille au milieu des Séraphins » avec sa sainte lance. En tant que «plus ancien dans la série des anges» et gardien des plus hauts secrets déjà « d’avant la création du monde », il peut se trouver « auprès du trône du Créateur ».
Le rôle exceptionnel de l’Archange Michel dans le Cosmos, ne dérive pas d’une de ses qualités de nature — il est et reste un Archange —, mais de l’une de ses qualités morales qui lui sont propres.
Elle laisse entrevoir une nouvelle attitude à l’égard du mal, qui n’est plus seulement évité, mais affronté et vaincu, non pas en son nom propre, mais au nom du Bien originaire. C’est ceci qui confère à son être une dignité unique en le faisant resplendir d’une splendeur inconnue avant. Son acte le rapproche de l’homme, lui aussi contraint à se mesurer aux puissances du mal, et accorde son agir depuis les origines à l’agir de Celui qui, pour décider des sorts de l’homme, descendra jusqu’à lui, en en partageant la nature. Michel est donc l’esprit destiné à suivre Christ dans sa descente du Ciel sur la Terre pour venir à la rencontre de l’homme.
De nombreux documents montrent comment cela fut perçu durant l’époque dont nous nous occupons maintenant. Dans l’hymne déjà mentionné, de provenance gothique espagnole, il est décrit comme celui qui, «fidèle en tant que créature à son Créateur, n’abandonne pas son royaume», et c’est celui-ci qui fait en sorte que « Satan soit repoussé dans l’abîme ». Il combat donc le dragon en vertu d’une pure présence intérieure, «demeurant dans la plénitude de la lumière», comme il est dit dans un autre hymne. Font aussi allusion à cela les plus anciens témoignages de la peinture et de la sculpture. En eux, Michel ne regarde pas le dragon en face, mais son regard est tourné horizontalement, proprement vers l’intérieur, le spirituel. Parfois, il n’a même plus besoin de combattre : par sa simple présence royale, le dragon est vaincu. C’est seulement dans les représentations postérieures que le conflit commence à devenir dramatique et Michel fixe alors l’ennemi, concomitamment avec une expérience plus directe du mal de la part de l’homme.
Par son exceptionnelle position de conscience céleste intacte à la frontière du monde terrestre, Michel apparaît comme le « visage des Hiérarchies célestes ». Il voudrait restituer à l’homme la conscience du monde suprasensible, et le préparer ainsi à recevoir dans l’intégrité de son être le don que lui fait le Christ, en le faisant participer à l’amour qui descendu du Commencement. L’homme peut accueillir cet amour également sans conscience suprasensible, mais dans un tel cas, il ne participe qu’avec une partie limitée de sa nature. Christ renouvelle l’homme en partant du centre de son être, Michel étend les bénéfices du renouvellement à l’entièreté de sa nature, dans laquelle se résument les intentions créatrices de tout le monde visible. Christ rachète l’homme, Michel le dispose afin qu’avec sa rédemption sa nature soit rachetée.
Dans tous ces cas, Michel apparaît comme celui qui veille sur le seuil qui sépare le monde terrestre de celui céleste. Grâce à son aide, l’homme se prépare à le franchir comme représentant du monde terrestre, produisant de celui-ci les vœux qu’il offrira dans le lieu dans lequel la grâce céleste descend.
Auprès de l’autel de Saint Michel de la chapelle d’Aix-la-Chapelle fut placé, sinon déjà du temps de Charlemagne, un peu plus tard, le trône impérial. Cela est la marque de la manière dont l’empereur ressentit sa propre fonction liée à l’influence spirituelle de l’Archange. Lui aussi, comme l’Archange, devait guider les destins du monde terrestre de manière que l’accès à la réalité transcendante restât constamment ouvert, sans interférer par ailleurs dans la domination de celle-ci.
Sa fonction était éminemment une fonction « cosmologique », dont le rapport avec la compétence du sacré était semblable à celui qui passe entre les arts libéraux et la théologie. Il y eut ainsi des empereurs dévoués à Saint Michel, tels qu’Henri II de Saxe et Frédéric Barberousse, et des empereurs « philosophes », tels que Frédéric II de Suède et Charles IV de Bohême. Ce ne sont que les deux aspects d’une même vocation.
À la position de Michel, en tant qu’Ange de l’Occident, est connexe aussi une autre fonction qui lui revient, très ressentie durant le Moyen-Âge : celle de guide des âmes défuntes. Elle oriente son activité en polarité à celle de l’Archange Gabriel. Alors que celui-ci conduit l’âme humaine sur les voies de l’incarnation terrestre, Michel la relie à la dimension céleste, et après l’avoir prédisposée, la guide dans ses destinées posthumes, vers les buts ultimes. À cette polarité entre Gabriel et Michel, l’art médiéval fait souvent allusion, non seulement dans des représentations singulières, mais aussi dans la disposition des motifs dans l’espace sacré, en ayant dans certaines églises des scènes de l’Annonciation vers le côté de l’abside et de l’autel principal et une représentation grandiose du Jugement universel, avec Michel coadjuteur du Christ, de l’autre côté. Parfois des chapelles apposés furent érigées, consacrées à Saint Michel, dans les zones de cimetière, celles-ci souvent élevées sur le terrain environnant, comme dans le cas de Fulda en Allemagne, où une petite église circulaire, l’une des plus anciennes en son genre, domine sur la colline émergeant à côté du grand établissement monastique.
La fonction de guide des âmes défuntes est souvent associée à l’image de la balance. Elle apparaît déjà sur un bas-relief du huitième-neuvième siècle, présent dans le sanctuaire du Mont Gargano, et on la retrouve par exemple dans le poème norvégien du Songe d’Olaf Åsteson, qui raconte un voyage dans l’autre monde durant les Nuits Saintes, et dont la source originaire semble très ancienne. On y dit : Maître Michel s’y tenait
Et sur sa balance les âmes pesait. À côté de lui Christ était, le Juge du monde.
Le motif de la pesée des âmes par Michel aura une vaste diffusion dans l’art seulement à partir du douzième siècle, en trouvant des interprétations diverses : sur les plateaux de la balance seront parfois représentés deux figures humaines, une sur chaque ou bien une ou deux figures humaines d’un côté et un diable de l’autre, ou d’autres combinaisons encore. La pesée ne doit pas être pensée de manière trop matérielle. Elle est plutôt un passage du pondérable à l’impondérable et concerne des équilibres immanents de l’âme humaine, qui ne deviennent manifestes que dans le monde suprasensible. D’une manière générale, ce sont les deux aspects de l’âme humaine à être pesés, celui céleste et celui terrestre, d’où la tentative de l’adversaire d’accroître le poids de ce dernier.
L’attribut de la balance n’est pas une adjonction arbitraire, mais un complément de l’image de Michel. Il correspond à ses facultés passives, comme l’épée correspond à celles actives. Avec l’épée, il agit, avec la balance, il accorde son agir à l’ordre universel. À telle fin, il lui faut une capacité d’écoute pure et impartiale, c’est pourquoi l’aiguille de la balance est souvent située dans la région cardiaque ou au moins à la hauteur du cœur. L’acte de la pesée renvoie à une quiétude transcendante, dont le combat spirituel est l’équivalent dans la dimension du temps.
L’image de Michel s’est ainsi déclinéée, pour l’humanité européenne, dans le laps de temps qui va du septième au douzième siècle. Si au début du neuvième siècle, Charlemagne pouvait constater que le culte de l’Archange s’était affirmé dans l’Empire et que le 29 septembre valait désormais universellement comme le jour de sa célébration, deux siècles après sa figure sera familière partout. La période romane est l’époque d’or de la spiritualité de Saint Michel. Les hommes ressentent sa présence et, en s’appropriant un motif de l’Ancien Testament, ils voient en lui l’esprit qui guide, non plus le peuple d’Israël, mais celui de l’Église, pensée de la manière la plus spirituelle possible, dans les batailles que celle-ci doit soutenir sur Terre. Durant cette seconde phase de sa révélation, Michel intègre désormais pleinement son action dans l’économie de la hiérarchie ecclésiastique».
Avec l’avènement de la civilisation gothique, situable vers la fin du douzième siècle, un nouveau facteur survient dans la vie spirituelle de l’humanité qui transforme le rapport de celle-ci avec la réalité suprasensible. L’homme commence à expérimenter le monde, non plus comme le lieu d’une révélation supérieure, mais comme le champ d’exercice de sa propre activité spirituelle. La révélation continue de valoir dans le domaine religieux, — de là l’intensification du culte de Marie —, mais dans le domaine de la connaissance de la nature, acquiert progressivement de l’importance ce qui peut être réalisé avec ses propres forces — de là l’abandon progressif des sept arts libéraux, et l’affirmation, dans les nouvelles universités, d’une aptitude scientifique principalement encline à la recherche. L’homme voit alors se concentrer dans l’activité formatrice de sa pensée le contenu qui, auparavant, en tant que vie substantielle de l’image, se révélait à lui de l’extérieur. Commence ainsi le « tournant anthropologique », qui deviendra radical à la Renaissance, en empreignant donc le climat de l’âge moderne. Le monde suprasensible s’éclipse pour faire place à l’initiative spirituelle de l’homme.
Durant cette période, on vit de l’héritage spirituel des siècles précédents, admis cependant avec une fraîcheur intérieure originale. Ceci vaut aussi pour Saint Michel. Il ne disparaît pas de l’horizon de la conscience, au contraire il devient le garant de l’expérience aurorale de la liberté.
Sous son regard flamboyant semblent s’accomplir, autant l’ascèse cognitive sévère des Dominicains, que la radieuse transformation des forces du courage en forces d’amour propre aux Franciscains et le même François ressentira le besoin d’ajouter aux traditionnels carêmes de l’Avent et de Pâques, un troisième en préparation à la fête de Saint Michel. Même les nouveaux ordres chevaleresques, qui servent alors de pont entre l’Orient et l’Occident, reconnaissent dans l’Archange victorieux leur esprit tutélaire.
L’architecture sacrée exprime le nouvel état des choses. Michel ne préside plus solennellement à la limite qui sépare le monde extérieur de l’enceinte sacrée, mais il trouve sa place, comme tous les autres saints, sur le fond, souvent en vitrail, de l’autel majeur, ou d’un des nombreux autels mineurs, au travers desquels l’espace s’articule à l’infini, presque pour retrouver dans la logique du rythme une présence perdue. L’attention se concentre alors sur l’événement principal du culte, tandis que se polarisent d’une part, le monde suprasensible, qui semble s’échapper dans une transcendance toujours plus inaccessible, malgré l’élan hardi des voûtes qui voudrait la remplir, et de l’autre, l’homme désormais conscient de sa propre responsabilité terrestre, qu’il consacre de nouveau dans la dévotion.
L’ère des cathédrales a une prédilection, eu égard à Saint Michel, pour le motif de la balance. Mais l’équilibre auquel elle fait allusion n’est plus celui qui se réalise après le passage à une conscience céleste, mais celui que l’homme réalise en soi, en se mesurant à la dimension horizontale de l’existence. Le visage de Michel est toujours plus un visage humain, dans lequel se reflète l’idéal de vertu et de beauté de la nouvelle humanité.
Dans une séquence De Sancto Michaele, attribuée à l’écrivain ecclésiastique Adam de Saint Victor, et adoptée dans la liturgie propre aux Dominicains, naît un motif dans lequel est recueilli celle qui devra rester la secrète, mais inassouvie aspiration de l’époque. On y parle de « l’admirable charité » de la Hiérarchie céleste, « qui nous aime et nous protège, afin que soit restaurée en nous la perte de Lucifer ». Peu après, on fait allusion à un homme futur, destiné à être « co-égal (coequalis) aux célestes ». Tout ceci devra rester un idéal. Une humanité « co-égale aux célestes » signifierait une nouvelle hiérarchie dans l’ordre cosmique, non seulement visible et instrumentale, comme celle ecclésiastique, mais spirituelle et réelle, ayant sa propre fonction, irremplaçable. À cela, l’humanité gothique pourra aspirer avec l’ardeur la plus pure de la foi et de la dévotion, sans avoir, cependant, les énergies pour le réaliser.
À l’époque de la Renaissance, l’homme tournera désormais le regard vers les merveilles du monde visible, en affinant les facultés qui en permettent la maîtrise. Avec la lente, mais inéluctable, imposition de la conception scientifico-mathématique du monde, il deviendra maître de la nature
visible, en perdant de vue, en revanche, le monde suprasensible. La scission qui s’accomplit au sein de la chrétienté ne favorisera pas un déroulement harmonieux et régulier de ce processus. Si les populations germaniques, majoritairement portées à l’expérience du suprasensible, y seront refrénées par le préjugé confessionnel, celles latines conserveront à ce propos une tradition vraie en soi, mais rarement appuyée par une expérience vivante. L’appel à des êtres spirituels, et donc aussi au même Michel, dans les cas où l’on voudra le conserver, restera, quand bien même en appui de nobles idéaux, le plus souvent formel. Un rapport conscient avec le monde suprasensible sera réservé à des individus isolés, prédisposés à cela, dont l’évolution se déroulera à l’abri du regard du monde et reliés entre eux par des liens eux aussi non apparents. Dans des conditions favorables seulement, et selon un mandat supérieur, ils se manifesteront une partie de leur savoir afin d’influer sur les impulsions formatrices de la civilisation.
À lumière de l’image de Michel, telle qu’elle résulte du cadre exposé ici, nous voudrions tenter de considérer, à titre de simple hypothèse, la possibilité relative à une développement ultérieur de sa révélation, après qu’elle s’est accomplie selon des formes de plus en plus spirituelles et adaptées à la constitution intérieure de l’humanité du temps. Un tel développement dériverait d’une communion encore plus profonde avec les intentions qui émanent de son être.
L’homme contemporain vit activement sa propre expérience dans le monde sensible, en l’organisant selon des catégories dont il est pleinement conscient — par exemple des relations d’espace et de temps, des liens de causalité physiques, etc. — et de manière telle que se forme sa représentation physico-mathématique du monde. Il peut cependant, par un acte ultérieur de sa conscience, diriger sa propre attention, au lieu de sur sa représentation, sur le processus formateur de celle-ci. Dans ce cas, il expérimenterait comme force productrice, ce qui, autrement est simplement produit. Il connaîtrait une activité spirituelle pure, laquelle se révélerait proportionnée à la capacité d’amour avec laquelle il adhère passionnément aux choses, en les aimant selon la mesure de leur être. L’activité spirituelle ainsi libérée ne resterait pas dans le domaine humain. Cette esprit là que la tradition chrétienne appelle Michel, pourrait l’accueillir dans le domaine de son activité propre, en la reconnaissant affine. L’homme, rendu participant à un contenu de conscience supérieur, commencerait à percevoir dans l’expérience de la réalité sensible les intentions créatrices qui la sous-tendent. Sans renoncer à l’image scientifico-naturelle du monde, il la verrait se compléter de son côté intérieur. Ce ne serait pas un succédané de la religion, comme ne l’était pas non plus les arts libéraux au Moyen-Âge, mais le premier pas vers sa spiritualisation. Il réaliserait le processus initiatique avec celle que nous avons appelé la « seconde phase de la révélation de Michel » et l’idéal s’avérerait de l’ère gothique, dans un certain sens cependant à partir du côté opposé : tandis qu’à l’époque il était une nostalgie d’une expérience qui arrivait à échéance, à présent ce serait le prélude de sa présentation nouvelle.
3. La mission de l’Archange Michel
Le processus de l’alliance spirituelle de l’homme avec l’Archange Michel est conditionnée, dans la mesure où son intelligence se soustrait à la domination des forces Célestes qui opèrent dans le suprasensible. En développant cependant en ceci l’amour essentiel pour le Divin l’homme s’engage sur le chemin qui le conduit à se réunir aux forces de l’Archange.
Le Karma ou destin, même quand il semble radicalement adverse, est l’expression de l’amour du monde suprasensible à l’égard de l’homme. Quand il accorde son intelligence avec l’amour qui s’exprime dans le destin, celui-ci commence à se révéler à lui, non plus seulement comme effet, mais aussi comme cause. Il peut alors participer consciemment à son élaboration.
L’Archange Michel est le guide invisible d’une telle conquête.
L’affinité de l’action de Michel avec l’amour qui se réalise dans l’intelligence, fait en sorte qu’elle entrouvre à l’homme le rapport au Christ, lequel est la source d’un tel amour. Michel apparaît comme l’être qui révèle à l’intelligence humaine, spécialisée dans l’investigation de la nature sensible, les liens cosmiques qui ramènent les manifestations de cette nature à l’ordonnancement moral du monde. Le monde racheté par Christ est un monde dans lequel s’exercent des intentions morales, et il ne peut être compris qu’à partir d’une cosmologie qui assigne à la causalité spirituelle la primauté qui lui revient. Telle est la vision de la nature à laquelle Michel éduque l’homme : «Comprendre le sens de la mission de Michel dans le Cosmos signifie parler de manière, que nos pensées puissent être aussi celles du Christ. Aujourd’hui, on doit parler de la nature, comme l’exige l’évolution de l’âme consciente. On doit accueillir en soi le mode de penser purement scientifico-naturel. Mais on devrait aussi, eu égard à la nature, apprendre à parler, à savoir, à sentir de manière conforme au Christ. Non seulement vis-à-vis de la libération de la nature, non seulement en ce qui concerne l’âme et le divin nous devons apprendre le langage du Christ, mais aussi au sujet de la nature ».
Michel guide l’homme vers une expérience de la nature qui soit en accord avec la révélation du Christ, mais il ne s’entremet pas dans ce qui concerne le rapport de l’âme humaine avec Christ lui-même. L’authenticité de la révélation de Michel consiste justement à servir celle du Christ, sans s’y substituer : « Se trouveront ainsi côte à côte l’expérience de Michel et celle du Christ. Grâce à Michel, l’homme trouvera de la manière juste, par rapport à la nature extérieure, la voie du suprasensible. La vision de la nature pourra, sans en être faussée, se situer à côté d’une vision spirituelle du monde et de l’homme, en tant qu’être cosmique — grâce à la juste attitude à l’égard du Christ, l’homme pourra expérimenter dans la relation vivante de son âme avec Christ Lui-même, ce qu’autrement il ne pouvait recevoir que sous la forme de la révélation traditionnelle de la foi »
Nous retrouvons ici, dans le pur domaine de la vie de l’âme, ce qui, dans la formation de l’homme médiéval, était le rapport entre arts libéraux et théologie.
À faire obstacle à l’évolution de l’âme qui, au travers des voies entrouvertes par Michel, s’approche du Christ, c’est cet être spirituel que Steiner, se référant à l’antique tradition iranienne, désigne du nom d’Ahrimane. Ahrimane est l’esprit qui s’est approprié l’intelligence cosmique lorsqu’elle passait des mains de Michel à celles de l’homme, pour pouvoir la référer entièrement à lui. Si le trait caractéristique de l’intelligence michaélienne c’est le don de soi, à la vérité des choses, celui de l’intelligence ahrimanienne est l’affirmation de soi à travers leur négation. À l’amour pour le Cosmos fait pendant le mépris. Son existence se déroule donc étrangère à la vie du tout et c’est à une telle aliénation qu’il voudrait mener les intelligences qu’il assujettit à son influence. Il «se trouve spatialement dans le monde auquel l’homme appartient, mais il ne développe aucun rapport de forces avec les êtres qui appartiennent régulièrement à ce monde.
S’il parvient à ce qui est dans ses intentions, Ahrimane rendrait semblable à la sienne l’intelligence qui fut donnée à l’humanité ».
Avec ceci, nous savons ce que nous devons comprendre par le « dragon » que Michel, à son exemple, nous invite à combattre et à vaincre. Il est la puissance qui voudrait nous induire à croire que l’unique réalité soit celle sensible, en favorisant, en vertu de cette limitation, le développement de la logique dans laquelle il n’y a aucune place pour une vérité qui puisse être aimée en proportion de l’être qu’elle manifeste. «L’intellectualité sourd d’Ahrimane comme une glaciale impulsion privée d’âme. Les hommes qui sont agrippés par cette impulsion développent une logique, qui semble parler d’elle-même de manière inexorable et privée d’amour, en réalité c’est justement Ahrimane qui s’exprime par son entremise, dans laquelle rien ne se révèle de ce qu’est un juste rapport profond émanant du cœur et de l’âme, de l’homme avec ce qu’il pense, dit ou fait ».
La victoire du dragon s’accomplit donc sur le plan de la connaissance, dans la mesure où celle-ci s’accorde profondément avec les forces du cœur. Elle est un événement de l’âme, jamais définitif, fruit d’un combat à soutenir tant que dure la conscience terrestre. Et de la persévérante victoire de l’âme, mûrit le climat silencieux et solennel d’une fête de Saint Michel, contre laquelle tout notre époque semble s’opposer : «Quand un jour, la fête de Saint Michel, en automne, sera vécue comme quelque chose de profondément vrai, alors dans le sentiment des hommes qui la célèbreront avec une profonde véracité, naîtra et vivra dans l’âme une tonalité fondamentale qui peut s’exprimer ainsi: comblée d’idées, l’âme expérimentera la lumière de l’esprit, quand l’apparence des sens n’évoquera plus chez l’homme qu’un souvenir».
4. Michel, gardien de l’avenir des humains.
Pourquoi Michel est si important pour nous ?
Nous savons que Michel, lequel a administré dans le passé l’intelligence cosmique, en la cédant à l’être humain au cours de l’évolution terrestre que Michel, justement, est conscient de ces grands dangers à la rencontre desquels s’avance l’homme suite à la prise de possession d’une telle intelligence. C’est pourquoi il voudrait constamment maintenir en relation avec les entités divino-spirituelles ce qui se développe chez l’être humain dans cette direction. Si cela ne se produit pas, le grand danger surgit que des entités ahrimaniennes, lesquelles connaissent cette émancipation de l’intelligence vis-à-vis des dieux, absorbent cette intelligence, en l’unissant à eux. De cette façon elles deviendraient les intelligences les plus puissantes du Cosmos.
Michel connaît parfaitement ces dangers et il sait aussi que l’homme ne dispose pas encore des facultés pour les reconnaître et que s’il rencontrait Ahrimane, il en serait donc victime. C’est pourquoi Michel tient les puissances ahrimaniennes sous ses pieds et il les repousse continuellement dans un monde sub-humain auquel l’homme, qui se développe régulièrement, n’a aucun accès. De cette façon Ahrimane est tenu en bride par Michel, ce qui est exprimé dans la conscience humaine par la puissante image du dragon harcelé par Michel et précipité dans l’abîme. L’anxiété constante de Michel, c’est celle-ci : sera-t-il en mesure de tenir les hommes éloignés d’Ahrimane, ceux-ci comprendront-ils l’Entité du Christ descendue sur la Terre afin qu’ils la suivent ?
L’entier patrimoine de sagesse du Cosmos christianisée, laquelle s’est manifestée sur la Terre grâce à la médiation de Michel. Des hommes l’ont accueillie.
Les hommes se trouvent toutefois en danger. Des puissances anti-michaéliques sont prêtes à engloutir les intelligences, à obscurcir et affadir la sagesse des dieux, afin que leurs énergies ne puissent plus agir, et les hommes ne soient plus en mesure de comprendre la sagesse.
C’est avec grand sérieux que nous devons accueillir le courant de Michel. Puisse un nombre suffisant d’hommes prendre conscience que cette puissance réelle et efficace est au milieu d’eux, puissent tous ceux qui en ont la force et le courage, non seulement de manifester la pensée de Michel qui est en l’âme, mais aussi la faire vivre dans leurs actes, puissent-ils devenir de fidèles serviteurs de Michel, pour le mener à la victoire et grâce à elle sortir l’humanité de la grande crise dans laquelle elle se trouve.
5. L’Archange Michel gardien de notre Evolution.
Si Michel est destiné à être le gardien de l’évolution, que doivent lui offrir les hommes qui veulent le servir ?
Nous savons, que Michel dans toute sa gravité s’avance vers l’homme pour l’aider à amener en pleine et souveraine floraison l’humanité en lui. Michel, en tant que serviteur des puissances divino-spirituelles de la seconde et troisième Hiérarchies, administra dans le passé l’intelligence cosmique. Lorsque celle-ci se sépara des puissances divino-spirituelles, pour trouver sa voie vers les hommes, Michel voulut continuer à agir entièrement dans le sens de ces puissances, en restant à leur service. Il décida de se placer de la manière juste par rapport à l’être humain et à cette fin, il voulut faire affluer en lui l’intelligence comme elle était, lorsque, imprégnée de forces d’amour, elle résidait auprès des puissances divines et spirituelles. Il était dans ses intentions que les hommes puissent développés non seulement l’intelligence dans la tête, mais encore aussi une intelligence qui émane du cœur. Il unit la chaleur intime remplie d’âme qui était dans son être et dans celui des puissances divines et spirituelles, avec l’intelligence, et il voulut susciter chez les hommes, au moyen de cette intelligence du cœur, l’amour pour le monde.
Ne peut avoir d’amour pour le monde que celui qui a uni en lui, de la juste façon, l’intelligence de la tête à celle du cœur.
Si cet amour est présent, il se reflètera aussi sur son propre soi et l’on sera alors en mesure d’aimer, en s’oubliant soi-même. Ainsi est tracée la voie pour trouver le Christ.
Michel veut conduire les hommes au Christ et, à cette fin, il cherche ses propres combattants.
L’Evolution aussi, laquelle est sagesse des dieux, veut préparer les âmes humaines à trouver le
Christ.
Une nouvelle époque de Michel a commencé. La compréhension de ce fait doit s’éveiller chez les hommes, l’être de Michel doit être compris. Actuellement l’Archange Michel assume la régence spirituelle, jusque-là détenue par l’Archange Gabriel.
Dans de grandioses images, nous furent révélées les précédentes périodes de régence de Michel, dont la dernière échut entre 601 et 247 avant le Christ et l’avant-dernière à l’époque de Gilgamesh, durant la civilisation chaldéenne.
Au début de cette dernière période de régence de Michel, l’activité d’Aristote se trouvait au centre de la vie culturelle et, en relation intime avec lui, les expéditions d’Alexandre. En Aristote conflua la sagesse de Platon qui dérivait des Mystère d’Éleusis. Pour la connaissance de la nature que possédait Aristote — une connaissance qui, pour expliquer tout ce qui est de nature terrestre, s’étendait jusqu’au ciel et puisait aux Mystères chtoniens et élections — le temps était désormais passé en Grèce pour ce genre de savoir. Il n’y avait plus d’hommes en mesure de comprendre ce savoir correctement. Il ne put être sauvé que grâce au fait qu’Aristote devint le maître d’Alexandre. Alexandre assimila ce savoir et au moyen de ses expéditions en Asie, transféra en Orient tout ce qu’il lui était possible de transmettre de la science naturelle aristotélicienne. De là elle passa dans les Écoles arabes et judaïques, parvint ensuite, au travers de l’Afrique, en Espagne, d’où elle agit sous une forme atténuée sur la mentalité scientifique européenne, en influençant des personnalités singulières de l’Europe du Centre et atteignit l’Irlande, jusqu’aux Mystères d’Hibernie. Ce fut le mérite d’Alexandre de rompre avec les étroites frontières nationales, que sa propre terre lui imposait, et de sortir vers le vaste monde pour y apporter la sagesse aristotélicienne, la scientificité aristotélicienne. Par ses expéditions, il manifesta qu’elle vivait en lui et que, grâce à elle, il pouvait pénétrer partout. En lui agissait fortement l’impulsion de Michel, l’impulsion à combattre pour une idée et à la répandre en dehors des confins de sa propre terre : il était cosmopolite. Il dut sortir comme un conquérant pour avoir la possibilité d’insuffler un élément nouveau dans le giron de civilisations antiques. Ces expéditions ne furent pas menées à son profit, mais bien plutôt pour honorer Aristote, pour en faire connaître les enseignements au monde entier. Tel était le sens de ses voyages en terres étrangères.
Cet état d’âme batailleur, cet agir par amour, ce dévouement total aux impulsions des entités divines et spirituelles, étaient la joie de l’Archange Michel. De là les succès sans précédents de l’avancée juvénile et vaillante d’Alexandre, lequel accomplit sans crainte ce qui était presque humainement impossible.
Durant l’époque de Michel décrite ci-dessus, fleurit en outre le centre des Mystères d’Éphèse, à la maison divine de la déesse Diane, détruite par un incendie. Il nous fut décrit comment, à Éphèse, on administrait autour du Mystère du Verbe, de la Manifestation, et comment au moyen de la compréhension de la parole humaine, un tel microcosme, on pouvait présager les secrets du Macrocosme. Les impulsions de l’Archange agissaient aussi dans les mystères d’Éphèse. Une vaste aspiration ardente à la liberté vivait dans ces doctrines de sagesse.
À ces mystères n’accédaient pas seulement les hommes, les femmes aussi pouvaient y être admises, ainsi que les étrangers qui en avaient la maturité. À Éphèse fut d’ailleurs donnée la première impulsion du développement de la personnalité.
L’impulsion de Michel trouve donc une claire expression à Éphèse, donc chez Aristote et Alexandre. À présent, nous nous trouvons de nouveau sous la guidance de Michel. Nous possédons la capacité d »Evolution.
Que devons-nous faire maintenant si nous voulons, avec Michel, Ascensionnés ?
Chers amis, dans ce cas, nous devons offrir à Michel la disponibilité à agir en partant de la liberté, sans cependant tomber dans l’égoïsme, par pur amour. Nous devons accueillir la liberté dans sa grandeur réelle. L’évolution doit devenir, plus encore que dans le passé, cosmopolite, et ne pas se cloîtrer dans des groupes singuliers de personnes ou rester limitée à des pays singuliers, elle est pour tous les hommes du monde. Telle est la volonté de Michel. Il voudrait voir l’amour pour le monde répandu entre tous les hommes.
Soyez prêts, vous les jeunes, vous qui êtes animés du feu, qui avez le courage, et développez l’intelligence non seulement dans la tête, mais aussi dans le cœur, soyez prêts à vous placer sous l’égide de Michel, à le suivre et à le servir.
6. Michel et la révélation du Karma
Si l’homme est prêt à servir Michel, il doit s’en approcher activement. Michel ne peut pas être rejoint au moyen d’une dévotion passive ou dans une attitude de prière, au contraire, on le rejoint en se portant activement dans le monde spirituel. On s’unit à ses légions par détermination du vouloir.
Michel étant étroitement connexe à l’humanité, dans la mesure où il lui revient d’administrer en elle les forces spirituelles, la révélation de l’intellect divin, on le trouve présent dans cette partie du monde spirituel que seul un voile subtil sépare du monde physique.
Il y avait de valeureux adeptes de Michel, des âmes humaines qui se trouvaient entre la mort et une nouvelle naissance, mais aussi des puissances de l’ombre, lesquelles voulaient empêcher ce qui, grâce à Michel, devait être donné au monde. Michel, lequel est dieu des Mystères solaires et comme tel, vivait dans le Soleil, est descendu, lorsque sa nouvelle mission sur Terre, sa nouvelle régence, débuta, jusqu’au monde éthérique, pour pouvoir s’approcher le plus près possible des hommes.
Dans le futur, il voudrait prendre demeure dans le cœur et dans les âmes des hommes terrestres.
Il a besoin de la confiance spirituelle de la part de l’humanité. Si cette confiance lui est accordée, il peut alors agir comme inspirateur des hommes. Ceux qui vivent intensément dans l’âme rationnelle ou affective et instaurent un rapport avec Michel, peuvent facilement parvenir à ce monde spirituel dans lequel il vit, en en recevant les inspirations.
À cause de ceci, il est aussi important que la jeunesse, qui vit aujourd’hui dans l’époque de Michel, sache ce qu’il accomplit. Dans cette jeunesse, qui se sent attirée vers l’évolution, il y a des âmes qui ont déjà vécu dans une précédente époque de régence de Michel, qui ont participé à l’école de Michel dans le monde spirituel, ou encore qui ont pris part aux deux. Ignorer la mission de Michel, et donc, ses intentions, refuser d’être guidés depuis le monde spirituel, ne pas percevoir ou bien vivre dans un état de sommeil ce qui s’annonce comme une action impondérable du monde spirituel, pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l’évolution de l’homme et de la Terre.
Le monde spirituel attend avec nostalgie que l’humanité vienne à sa rencontre ; il attend avec nostalgie que l’homme individuel, en se reconnaissant comme une âme de lumière, embrasse volontairement la lumière du monde spirituel en s’abandonnant à lui.
Même les esprits des éléments attendent leur libération et leur réveil par l’entremise de l’être humain. Ils se sentent en danger, si les hommes ne leur viennent pas en aide, de finir dans le royaume du dragon, d’Ahrimane. L’inquiétude règne parmi eux. Partout, au-dessus et autour de l’homme, il y a un mouvement de ce genre.
À un groupe de personnes élues, furent confiés des patrimoines de sagesse, des dons de la part du plus sublime des maîtres et guides de l’humanité. Il montra tout ce qui peut faire progresser les
hommes dans leur évolution et quels étaient leurs tâches ; il montra comment on pouvait apporter de l’aide aux esprits des éléments et comment ceux-ci pouvaient à leur tour aider ; il montra comment se manifestaient sur la Terre les entités spirituelles, comment elles agissaient chez les hommes et espéraient être comprises d’eux.
Les voies sont balisées, le savoir est donné, partout règne l’attente impatiente, le mouvement !
Le sommeil de l’humanité est profond. Les démons opposés à Michel ricanent, ils sont prêts à l’attaque. « Profitons-en ! », ainsi s’expriment-ils dans leur attitude.
Encore plus claire et persuasive devint la voix du maître. Les lois du Karma furent dévoilées.
Le dévoilement des secrets du Karma suscite toujours une très forte opposition de la part des puissances ahrimaniennes, lesquelles veulent dissimuler le Karma. Il fallait que ces résistances fussent surmontées, si l’on voulait éviter que l’Evolution soit éloignée des forces rajeunissantes, des impulsions de Michel.
Comme l’entité du Christ s’unit à la Terre pour le bien de l’humanité. Il s’agit alors d’une action conforme au Christ. Une partie des ennemis de Michel fut réduite au silence. Sans réserve, on put donc parler des vies terrestres répétées de personnalités en relation avec l’Archange ou en lutte contre lui. La partie restante des ennemis de Michel sera vaincue, quand le Karma sera compris des hommes.
Si celui-ci est compris avec les forces du cœur et de la tête, si, sans émotion ni frivolité, avec un profond sérieux, sont acceptées et comprises les vies terrestres répétées, alors ces ultimes démons anti-michaéliens pourront aussi être vaincus et l’époque de Michel, avec l’événement imminent du Christ, pourra suivre son cours.
Vieux et jeunes devront unir leurs forces. Le destin les a amenés à se rencontrer, afin qu’ils puissent se comprendre et s’aider mutuellement. Les vérités spirituelles restent toujours les mêmes, soit qu’elles se manifestent à des époques anciennes ou récentes. Ne changent que la façon dont elles s’approchent des hommes et la manière dont ceux-ci se les approprient. Nous nous trouvons dans une époque de l’Archange Michel. Son langage résonne en nous. Quiconque, vieux ou jeune, peut l’entendre s’il le veut. Rassemblons-nous sous sa bannière !
Michel peut être rejoint en se plaçant activement dans le spirituel ; on ne le rejoint pas au moyen d’une dévotion passive ou d’une attitude de prière.
Il y a un grand désir dans le monde spirituel d’aider les hommes, une attente impatiente dans le monde élémentaire pour être libéré avec le concours des hommes. Au-dessus, en-dessous et autour de l’homme, on s’agite. Le divin spirituel voudrait se manifester.
Comprendre le Karma en soi et chez les autres, signifie vaincre les puissances ahrimaniennes. Par les révélations sur le Karma a débuté le conflit entre l’Archange Michel et Ahrimane.
7. Présence de l'Archange Michel en Orient et en Occident
Quand l’impulsion de Michel agit dans l’humanité terrestre, ce qui était initialement enseigné dans un centre spirituel, est à présent transmis et diffusé à tous les peuples de la Terre, à toutes les régions dans lesquelles existent des possibilités pour une action spirituelle. Ainsi eurent lieu les expéditions d’Alexandre, par lesquelles fut porté en Orient tout le savoir aristotélicien, ésotérique autant qu’exotérique. On peut parler dans ce cas d’un courant de l’Archange Michel.
Quelque chose d’autre advint cependant durant cette régence-là. Quelque temps avant les expéditions d’Alexandre se déroulèrent, à partir de l’Occident, et plus précisément de la côte occidentale de l’Angleterre, les entreprises des chevaliers du roi Arthur. Autour de la Table ronde du roi Arthur se réunirent douze chevaliers, sages et guerriers de l’Archange, lesquels avaient pour mission de civiliser, en partant d’Occident, le centre et le Nord de l’Europe, en libérant leurs habitants de leur rude astralité en l’expulsant sous forme d’animaux féroces. Les chevaliers d’Arthur possédaient la faculté de percevoir dans le jeu des éléments naturels — dans lesquels se rencontrent les esprits nés du Soleil et les esprits nés de la Terre, dans l’eau ou dans l’air, les impulsions provenant du Soleil, dans lequel résidait encore la sublime Entité du Christ, et de les accueillir dans leur corps éthérique. Grâce à la présence en soi de cette force solaire du Christ, ils purent entreprendre la lutte contre les bêtes astrales et les vaincre, en purifiant ainsi ces territoires et les hommes qui y habitaient, pour les préparer à accueillir les impulsions solaires.
Ici aussi, on peut parler d’un courant de Michel, lequel procéda cependant d’Occident en Orient. Une fois la période de régence de Michel achevée, il passa ensuite dans un courant chrétien dans lequel on faisait encore l’expérience de la présence du Christ dans la nature, et ceci même après que Celui-ci était descendu sur la Terre.
Que représentent ces courants ? Nous trouvant de nouveau dans une époque de Michel, il est important pour nous de nous occuper d’eux. La question surgit alors : quelle direction prendront les courants de cette époque ? Qu’est-ce qui s’annonce, maintenant que la régence de Michel vient juste de commencer ?
La spiritualité, dont nous savons qu’elle a afflué depuis les mondes suprasensibles, de l’enseignement de Michel, en tant que sagesse, s’est concentrée de manière cosmopolite si elle est régulièrement accueillie. C’est donc notre tâche à nous, qui sommes sous l’impulsion de Michel, de répandre partout autour de nous ce patrimoine spirituel. La direction spirituelle dans laquelle se déplacera Michel, y compris dans l’avenir, sera principalement le Nord-Est. Et unies à lui se déplaceront également ces individualités qui, dans le passé aussi, ont agi dans le courant d’Aristote-Alexandre et dans celui d’Arthur.
Si l’on considère quelles forces destructrices d’Orient pénètrent en Occident, déjà manifestes dans les plus récents événements mondiaux, on peut comprendre quelle énorme importance acquerra cette direction Nord-Ouest et quelle grande responsabilité détiennent justement ces centres, déjà présents aujourd’hui en Europe du Centre, tel un rempart lumineux, est portée en Orient . Nous nous trouvons au-dessus d’un volcan, lequel peut faire éruption d’un moment à l’autre, dans le cas où il n’y aurait pas assez de forces spirituelles sur Terre capables de l’en empêcher. Or, seront présentes suffisamment de forces spirituelles, si l’on peut exercer tout ce qui, grâce à Michel, afflue dans notre temps.
8. Notre destin à la lumière de l’Archange Michel
Nous nous trouvons dans une époque de Michel et nous devrons de plus en plus nous rendre compte combien notre lien avec Michel est profond et comment l’Evolution constitue une impulsion de Michel pour les hommes dans l’état de conscience actuel.
Nous avons entendu que Michel est en rapport avec l’évolution de l’intelligence cosmique, dont Lui, le plus important des Archanges et des esprits solaires, dut céder l’administration dans le cours naturel de l’évolution universelle. Il le fit au moment où cette intelligence cosmique parvint sur la Terre, en devenant le patrimoine des hommes. Dans ces périodes de régence précédentes, Michel envoyait l’intellectualité sur la Terre au moyen des rayons du Soleil physique et les hommes qui en étaient sensibles en étaient inspirés. Des inspirations similaires se produisaient dans les Mystères solaires antiques, dans lesquels ces secrets étaient connus.
Peu à peu, le temps approchait où les hommes commençaient à développer l’intellectualité en eux, grâce à leurs propres énergies. Ce processus parvint à son accomplissement au huitième siècle, et à partir de ce moment, nous rencontrons sur la Terre des hommes dotés de pensées propres, ce qui n’était pas possible dans une mesure égale avant la descente complète de l’intelligence cosmique sur la Terre. Cette époque avait été préparée par la philosophie d’Aristote, dans laquelle s’exprimait le lent détachement de l’intellect terrestre de l’intelligence cosmique, qui était contemporain à la disparition des lieux des Mystères.
La nécessité de céder l’intelligence cosmique à la Terre dérivait du fait qu’à la Terre l’Entité du Christ s’était unie. La descente du Christ fut pour Michel le signal qu’il devait céder l’administration de cette intelligence. Cela le mit toutefois dans la situation singulière de ne plus pouvoir envoyer ses propres impulsions sur la Terre. Il dut attendre que le début de sa nouvelle période de régence alors que dans le passé, même en dehors de ces périodes, il était en condition d’envoyer constamment ses propres impulsions depuis le Soleil. Ayant cédé l’administration de l’intelligence cosmique, Michel fut contraint à l’inactivité.
Sur la Terre, les hommes étaient désormais privés des impulsions de Michel et cela fut surtout perceptible à partir du quinzième siècle, alors que commençait à se développer l’âme consciente.
Les hommes avaient bien des pensées propres, mais aucune impulsion de pouvait plus leur être donnée à partir du monde spirituel.
En ce temps-là, Michel cherchait à établir une communication avec l’humanité en réunissant autour de lui, à partir du quinzième siècle jusqu’aux dix-huitièmes et dix-neuvièmes siècles, les âmes qui se trouvaient dans le monde spirituel et qui étaient liées à lui dans la précédente de ses régences.
Il put ainsi rassembler autour de lui les principales individualités de l’époque de la floraison des âmes dominicaines et celles qui leur étaient liées ; celles de l’époque d’Alexandre et celles des platoniciens, qui avaient agi dans l’école de Chartres, auxquelles s’unirent un grand nombre d’âmes en recherche, animées d’une puissante nostalgie spirituelle. Michel les réunit toutes autour de lui et leur donna des enseignements. Naquit ainsi une « école suprasensible »dans laquelle fut enseigné ce qui, dans les époques antiques ou primordiales, avait été annoncé sur les lieux des Mystères. Ces âmes prirent part à quelque chose d’insolite, qui se produisit pour la première fois dans le monde spirituel sous la direction de l’Archange. Ce qu’elles vécurent alors s’imprima fortement en elles.
Normalement, dans la période qui s’étend entre une mort et une nouvelle naissance, les âmes humaines élaborent le Karma de leur destinée successive sous la direction des entités spirituelles.
Toutefois, au monde, comme il advenait alors, rien n’avait jamais été élaboré au moyen des enseignements de cette école suprasensible.
Jamais les âmes n’avaient été instruites de cette manière sur les lois du Karma. Lorsque celles qui avaient reçu une telle préparation retournèrent sur la Terre, elles ressentirent l’impulsion à se relier au mouvement évolutif. Dans ce mouvement, elles rencontrèrent, tout en suivant d’emblée une impulsion encore inconsciente, la continuation de ce qu’elles avaient expérimenté dans le suprasensible avant leur vie terrestre. Au plus profond de leur cœur, intimement connexe à leur destin, avait été déposée la connaissance que Michel leur avait accordée.
S’occuper désormais des lois du Karma, signifie s’occuper des enseignements qui se sont déroulés dans les mondes spirituels, grâce à Michel.
Une opposition terrestre à l’activité de l’Archange est constituée par l’œuvre d’Ahrimane, lequel cherche à détruire, en l’extirpant du domaine terrestre, ce que Michel octroie comme doctrine de sagesse. Ici Ahrimane agit de manière ininterrompue contre Michel et les hommes qui sont abandonnés à eux-mêmes, c’est-à-dire ceux qui sont privés de son inspiration, se trouvent dans le danger permanent d’être saisis par Ahrimane. Pour faire face à un tel danger, il existe aujourd’hui, en ce début d’une nouvelle époque de Michel, des hommes à l’expérience de ce qui, des quinzièmes, seizièmes, dix-septièmes et dix-huitièmes siècles comme enseignement, et jusqu’au dix-neuvième siècle en imagination puissante, avait été donné par Michel pour éveiller les hommes à une conscience plus élevée.
C’est justement dans cette conscience plus élevée, qu’Ahrimane perçoit un danger majeur pour le déploiement de sa propre puissance. Tenir les hommes dans un état de sommeil, lui convient parfaitement puisque dans ce cas, l’action consciente du Karma n’est plus un objet d’expérience. Il s’oppose à toutes forces contre la révélation des lois du Karma. Une condition d’éveil et une percevoir conscient sont très inopportuns pour Ahrimane, lequel ne peut avoir d’influence que sur les hommes qui ne disposent pas d’une telle conscience éveillée.
Dans l’actuelle période de régence de l’Archange, l’évolution ultérieure de l’humanité exige la révélation des lois du Karma.
Si la conscience du Karma est étouffée par Ahrimane, ce qui s’exprime dans la peur des hommes à s’en occuper, alors les impulsions de Michel seront perdues et le premier siècle de sa régence passera sans que soit advenu ce qui devait advenir en tant que tâche assumée par lui à ses fidèles. Dans ce cas, cependant, la civilisation humaine s’engagera sur le chemin de l’abîme, en perdant la voie lumineuse tracée par les dieux.
Un autre danger pèse de toute sa menace, provenant lui, d’une autre direction, de celle de Lucifer. Si le plus grand sérieux n’est pas en vigueur dans les cœurs des hommes, si la modestie et la bonne volonté n’impriment pas la vie de l’âme de ceux qui s’occupent de ces grandes vérités, alors Lucifer prend possession de leurs âmes. Ahrimane ne veut pas que les lois du Karma soient expérimentées consciemment dans les cœurs des hommes. Lucifer quant à lui se réjouit qu’ils s’occupent du Karma de manière frivole, avec suffisance et auto-complaisance. En équilibre entre Ahrimane et Lucifer procéderont ces hommes-là qui ont suivi avec fermeté Michel, qui les précède avec sagacité en leur indiquent la voie.
Nous devons reconnaître avec courage les dangers qui menacent de la droite, à cause des suggestions d’Ahrimane et de la gauche à cause des appâts de Lucifer, en tenant effectivement compte d’Ahrimane et de Lucifer, sans pourtant se laisser séduire par eux et en allant de l’avant pour rendre les impulsions de Michel efficaces.
9. Deux groupes d’âmes de l’Evolution.
De nombreuses âmes ont traversé de nombreuses incarnations terrestres dès l’époque atlante. Dans leurs incarnations préchrétiennes, elles avaient vénéré, à l’intérieur des Oracles solaires existants alors, l’Entité du Christ présente dans le Soleil, grâce à une conscience clairvoyante instinctive, qu’elles auraient fini par perdre. Quand elles revinrent sur la Terre à l’époque du Mystère du Golgotha, et dans les premiers siècles qui suivirent, elles ne possédaient plus aucun savoir clairvoyant autour de l’Entité solaire, mais seulement une tradition plus ou moins vivante. Cette tradition aussi s’étant peu à peu perdue, maintes de ces âmes n’avaient plus, eu égard au Mystère du Golgotha, que l’idée qu’un Dieu provenant d’on ne sait où, s’était uni à un corps physique et, en tant que Jésus de Nazareth, avait erré sur la Terre. Que ce Dieu fût un Dieu solaire, elles en avaient perdu la conscience et elles commencèrent alors à en disputer dans les conciles, en acceptant finalement ce qui fut dicté par Rome. Certaines de ces âmes, toutefois, qui possédaient encore un souvenir vivant de la tradition relative à la nature solaire du Christ, ne purent se laisser déterminer par les conciles et furent désignées, puisqu’elles persévéraient dans leurs conceptions, comme des hérétiques, et la même chose survint à certaines âmes appartenant au premier groupe, qui portaient en elle la notion vivante du Christ-Soleil. Les âmes du groupe que nous venons de décrire ont eu leur incarnation décisive dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, et aussi peu après le mystère du Golgotha, alors que dans leurs incarnations dans l’ère préchrétienne, elles avaient assimilé beaucoup du platonisme.
Ces groupes d’âmes donc, avant de s’incarner de nouveau dans le temps présent, accueillirent ensemble les puissantes imaginations, données par Michel dans le monde suprasensible au début du dix-neuvième siècle.
Le groupe des âmes qui avaient vécu leurs incarnations plus importantes dans l’ère préchrétienne, savaient que le Christ était descendu sur la Terre depuis le Soleil, parce que durant l’époque du Mystère du Golgotha, elles avaient elles-mêmes assisté, dans les mondes suprasensibles, à l’adieu de l’Entité du Christ au Soleil et elles avaient compris la nature d’un tel événement grâce au savoir qui leur venait des Mystères. Les âmes de ce groupe, alors que se présentèrent à elles les puissantes imaginations données par Michel, lesquelles révélaient en tableaux vivants la cosmologie entière et les secrets de l’Entité du Christ, reçurent les plus vigoureuses impulsions à devenir, une fois revenues sur la Terre, d’authentiques âmes chrétiennes, dotées de la ferme volonté d’apporter sur la Terre tout le contenu de ces puissantes images, en l’adaptant à la Terre elle-même, afin qu’il fût compris par l’humanité.
Les âmes d’un autre groupe, qui avaient eu leur incarnation décisive dans les premiers siècles après le Christ, qui avaient assisté au Mystère du Golgotha et en avaient été, peu de temps plus tard, fortement impressionnées et n’avaient pas reconnu le Christ comme Dieu solaire, furent plongées dans un état de totale incertitude lorsque ensuite, dans la période qui s’écoule entre la mort et une nouvelle naissance, elles ne retrouvèrent plus le Christ dans le Soleil. Ces âmes reçurent les imaginations suprasensibles dans un état qui n’était pas aussi éveillé, tel que chez celles du premier groupe, de sorte que, en revenant sur la Terre, elles avaient, en vertu du souvenir inconscient de tout ce qui avait été expérimenté dans les monde suprasensibles, la nostalgie effectivement et l’anxiété de retrouver le Christ sur la Terre, mais sans la stimulation à être actives.
C’est important de se reconnaître dans l’un de ces groupes, de s’examiner soi-même de manière à éprouver, le sentiment d’appartenance à l’un ou l’autre de ces groupes.
Pourquoi est-ce si important ?
Ceux qui ont eu leur incarnation décisive dans l’ère préchrétienne, trouvent le plus souvent la voie qui les ramène au monde spirituel en se consacrant à l’approfondissement des liens cosmologiques. Leur travail méditatif va dans cette direction. Ceux dont l’incarnation décisive tomba dans les premiers siècles après Christ, développent par contre le meilleur de leur activité en approfondissant le christianisme.
Même pour le nouvel art médical la connaissance de ces deux types se révèle d’une grande importance. Pour ceux qui appartiennent au premier des deux types décrits, le médecin, en cas de maladie, cherchera au moment d’intervenir en thérapeutique, à partir du système de la tête ou de celui du métabolisme, dans le second groupe, par contre, les forces de guérison devront être stimulées au moyen du système rythmique. Il existe naturellement des cas intermédiaires à ces deux groupes, et justement c’est au médecin qu’est largement donnée l’occasion de les observer. Un approfondissement de l’art médical représente en effet en même temps un aspiration intense à la connaissance de l’homme, laquelle à son tour est intimement reliée à la réalité du Karma.
10. La Résurrection des Mystères
L’institution des Mystères a joué dans l’ère préchrétienne un rôle important pour l’évolution de l’humanité. La direction de toute la vie spirituelle lui incombait, de sorte que rien d’important n’advenait sans que les impulsions relatives fussent reconductibles aux Mystères. Dans les sièges des Mystères se produisait des rencontres entre initiés ou initiants et les dieux, ce qui n’était possible qu’en ces lieux.
Au fur et à mesure que dut se développer la liberté humaine, l’être des Mystères se retira jusqu’à disparaître au quatrième siècle après Christ. La possibilité de l’initiation n’a cependant jamais disparu, ce n’est que sa forme qui changé. Toutefois la direction de l’humanité se tut pour ce qui est d’une influence directe du monde spirituel, car cette dernière n’était possible que par l’entremise des Mystères. Les hommes devaient désormais s’appuyer sur eux-mêmes et être amenés à agir en partant de leur impulsion propre.
Les Mystères existèrent des temps primordiaux jusqu’à l’époque grecque et l’on peut parler dans ce cas de Mystères antiques ou orientaux et de Mystères nouveaux ou grecs.
Dans les Mystères antiques orientaux, les dieux eux-mêmes apparaissaient et présentaient aux hommes, par l’entremise des prêtres-sages ou des initiés, les biens célestes dont ils voulaient faire don. Les dieux eux-mêmes descendaient jusque dans les substances et les actes cultuels, les prières des prêtres en étaient empreintes. L’homme ne se sentait pas isolé, mais au contraire, réellement uni au Cosmos, uni au Soleil, à la Lune, à Saturne et aux autres planètes, et il percevait le spirituel dans la nature. Les cérémonies et sacrifices se réglaient selon les saisons et le cours des astres, puisque les dieux ne pouvaient se manifester dans les Mystères qu’à certains moments, déterminés par la constellation astronomique.
Il en advint autrement dans les Mystères grecs plus récents. Les dieux n’y descendaient plus, mais c’étaient aux hommes à s’élever vers eux. L’homme ne percevait plus qu’une image réfléchie des dieux. Indépendamment des saisons et des positions des étoiles, il pouvait, dans l’atmosphère des Mystères, parvenir à ses images, s’il en était suffisamment digne, en exécutant certains exercices de l’âme ou des actes cultuels. Les cérémonies se déroulaient sur la base des vues des prêtres. L’homme se sentait davantage lié à la Terre et était initié aux Mystères terrestres.
Entre les Mystères antiques et les nouveaux, il y en avait d’intermédiaires. En eux les dieux envoyaient leurs énergies dans les sièges mystériques et de telles forces pouvaient être accueillies par les hommes. Les cérémonies étaient riches de paroles magiques que prononçaient les prêtres.
Ceux d’Éphèse appartenaient à ce type de Mystères. En eux, les dieux avaient perdu la possibilité de descendre, et n’opéraient plus que par leurs forces. Des paroles magiques retentissaient dans ces cérémonies. Les disciples étaient initiés, comme déjà dans les Mystères antiques, aux secrets de la Lune. De tels secrets sont en rapport avec l’être humain et mènent à une connaissance du corps éthérique. Aux disciples des Mystères on enseignait que dans la descente de l’homme d’un existence pré-terrestre à celle terrestre, le corps éthérique se forme grâce aux forces de la Lune, dans lesquelles ont agi à leur tour celles de Mars, Mercure, Jupiter, Vénus et Saturne.
On leur enseignait donc que quelque chose devait être retenu, afin que la formation du corps éthérique se déroulât tranquillement et ce quelque chose provenait du Soleil. Du Soleil provenaient des forces lesquelles n’avaient rien à faire avec la formation du corps éthérique. Les forces solaires ne se trouveraient en rapport qu’avec le « Je » et le corps astral et n’agiraient qu’avec un effet dissolvant et destructeur sur le corps éthérique : ce qui, dans les forces solaires, peut agir sur le corps éthérique, devrait d’abord passer au travers de la Lune, et devenir une lumière lunaire.
Après que cet enseignement avait été accordé, les initiants devaient parvenir à l’expérience du monde éthérique, ils devaient se rendre indépendants du corps physique et vivre dans le corps éthérique. Les disciples d’Éphèse étaient enfin conduits, après des préparations de toutes sortes, au cœur du Temple. Là, en ce point central du Temple, se trouvait une statue de la déesse Artémis, une figure féminine aux multiples mamelles. La déesse Artémis, laquelle est une entité lunaire dotée d’un autre nom dans le monde spirituel, proche de Michel et préposée à la guidance des Anges lunaires, est la déesse qui faisait affluer la sagesse des Mystères éphésiens, une sagesse qui n’était pas seulement lunaire, mais qui, grâce à Michel, était pénétrée de qualités solaires. C’est de cette manière que surgit à Éphèse un savoir compréhensible de tout le Cosmos, et c’est pour cette raison, que le Temple de Diane ou d’Artémis eut alors une si grande importance. Les impulsions de Michel, d’autant plus renforcées car il avait la régence de l’époque, s’exerçaient en outre du fait que l’accès aux Mystères n’était pas limité aux gens natifs du lieu, mais aussi aux étrangers et les femmes pouvaient être accueillies et initiées, ce qui n’était pas possible en d’autres lieux de Mystères.
Conduits au cœur du Temple, les disciples, après de nombreux exercices répétitifs préparatoires, étaient entraînés à se concentrer et à expérimenter l’image de la déesse Artémis et à recevoir de cette façon l’impression des forces cosmiques de la vie qui édifiait la figure humaine, à laquelle ils devaient s’identifier. Cette identification consciente avec l’image de la déesse avait comme effet, que l’on ne faisait plus attention à la Terre et à ce qui apparaissait à sa surface, mais que l’on se sentait déliés d’elle, libérés des limites de sa propre peau et en relation avec le monde éthérique. On était alors dans la sphère de la Lune, on vivait dans les forces lunaires, lesquelles contenaient toutefois en elles tout ce qui vivait dans les autres planètes de notre système solaire. On devenait un être de lumière de la Lune capable d’accueillir ce qui advient dans la sphère lunaire, à la périphérie de la Terre, dans le monde éthérique.
Le Temple d’Éphèse fut incendié par une main scélérate et entièrement détruit par les flammes. Cela advint en 356 avant Christ. Grandiose et puissant fut le patrimoine de sagesse qui afflua entre ses murs, et celui-ci, alors que les flammes dévoraient le Temple, se communiqua et s’inscrivit dans l’éther cosmique, de sorte que la sagesse, qui était gardée au sanctuaire du Temple, est à présent répandue dans l’éther cosmique, suite à l’incendie, et elle est visible pour l’homme qui s’est élevé à la connaissance imaginative.
Tout ce qui est inscrit dans l’éther cosmique repose dans les cœurs des hommes et que nous, si nous ouvrons nos cœurs d’une manière juste, nous pouvons parvenir à la connaissance de ce qui d’Éphèse est présent dans l’éther cosmique.
Si l’on retourne par la pensée chez Aristote, alors qu’il visita avec Alexandre les Mystères de Samothrace, en vertu de la parole qui y résonnait avec une force magique, ré-affleurèrent les secrets des Mystères d’Éphèse et les souvenirs de sa vie terrestre précédente reliée à ces Mystères, nous nous rendons compte qu’en s’émergeant dans les trésors de sagesse la possibilité nous est donnée de parvenir à l’expérience des secrets du devenir du monde, déchiffrables dans l’écriture stellaire de l’éther cosmique.
Aussi ce qui repose dans les profondeurs des cœurs humains pourra s’ouvrir et se manifester comme un savoir correspondant à l’écriture stellaire. C’est justement à présent que pourrait venir du monde spirituel les impulsions les plus vigoureuses pour vivifier à nouveau ce savoir et ériger ici un lieu des Mystères qui, comme dans les époques antiques, puisse devenir un lieu d’accueil des dieux, où le Christ puisse se révéler dans son corps éthérique aux hommes qui, en un tel centre, ont atteint la préparation due.
Date de dernière mise à jour : 18/09/2023